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Lachapelle sous Chanéac
6 janvier 2014

LES VEILLEES D' AUTREFOIS

 

VEILLEE

Dans les années 1930 – 1950, les veillées remplaçaient avantageusement la télévision. Elles étaient de très bons moments de rencontres qui brisaient l’isolement et permettaient d’avoir des nouvelles des familles et du village, pendant les longues soirées d’hiver.

 

Il y avait deux types de veillées : les informelles de voisins qui arrivaient sans prévenir et les veillées avec invitation.

Les voisins qui arrivaient sans prévenir étaient des personnes âgées, seules, qui venaient se distraire un peu, trouver un peu de chaleur humaine, et peut-être un peu de chaleur thermique. Des plus jeunes venaient aussi pour sortir du cadre familial.

On s’installait alors, autour du feu ou du fourneau, sans déranger le chef de famille en train de faire des paniers ou de rempailler une chaise. Les dames âgées n’apportaient pas d’ouvrage, mais n’oubliaient pas leur « chauffe pieds » qu’elles glissaient au bas de leurs jupes longues. Les enfants scolarisés étaient invités à aller au lit, mais n’obéissaient pas la première fois, surtout si une mémé partait sur des histoires de loups, de « trèves », de feux follets et de brigands.

Il faut dire qu’ils y avaient des lieux mal famés car isolés des maisons. Par exemple, le pont du poivre, le pré d’Astier (où il n’y avait pas de maisons comme aujourd’hui), le pré Bois et bien d’autres. C’est vrai qu’il y avait des « malfrats » qui arrêtaient paysans et marchands lorsqu’ils s’étaient attardés à la foire avec un peu d’argent dans la poche.

Les enfants se serraient contre leurs parents et leurs cheveux se dressaient droit sur la tête. Pendant la conversation, certaines dames âgées sortaient de leur profonde poche de petits coffrets sculptés. C’étaient des tabatières… et oui quelques dames prisaient comme les hommes1.

 

Les jeunes parlaient de leur travail souvent de journalier. Puis, ça partait sur la chasse, sur ce lièvre que l’on avait manqué la nuit passée. Car il faut savoir qu’en 1940 – 1941, le gouvernement de Vichy avait réquisitionné tous les fusils, mais certains malin qui en possédaient deux, avait restitué le vieux et conservé le plus récent bien huilé en lieu sûr. Ce sont ceux-là qui servaient les jours de pleine lune pour aller à l’«espère ». Ces braconniers attendaient dans la forêt que les lièvres sortent en faisant la sarabande pour les tirer à la lueur de la lune et de la neige, s’il y en avait. Le pourcentage était faible !

Il y avait un autre mode de braconnage, la pose des « collets » le soir, souvent faits d’un câble de frein de vélo fixé solidement à une branche sur le passage fréquenté par les lièvres. Mais il fallait se lever tôt pour aller lever les pièges, car il y en avait qui étaient très matinaux, surtout pendant la guerre, car un beau « capucin » améliorait bien l’ordinaire.

 

Soiree-au-coin-du-feu

Les gens s’en allaient, souvent pas très tard, après le petit commentaire sur le temps qu’il risquait d’avoir le lendemain, et un bref bonsoir.

 

Enfin, il y avait les veillées avec invitation. La maîtresse des lieux avait passé son après-midi à ses préparatifs, aux derniers coups de balai et de chiffon. Venait enfin, le temps de faire le fâmeux gâteau de Savoie, puis la crème chantilly qu’il ne fallait pas manquer. Après le travail, les hommes remplissaient la réserve de bois. Et avant que la fée électricité ne montre le bout de son nez, les hommes alimentaient et réglaient les lampes à pétrole et les lampes à acétylène, que l’on appelait lampe à « carbure ».

 

On soupait tôt, tout était « nickel », enfin le bruit des sabots ferrés se faisait entendre. Après le bonsoir d’usage et les embrassades, les gens de la maison débarrassaient les vêtements. Enfin, chacun prenait place. Les hommes autour de la table, les dames faisaient le rond autour du feu ou du fourneau, que l’on tenait plein jusqu’à la gueule (il fallait que les convives aient chaud même les plus près éloignés).

Les dames sortaient leur « brouchille » (tricotage). Elles en profitaient pour défaire de vieux tricots élimés, même de différentes couleurs. Après avoir lavé cette vieille laine, elles retricotaient avec de savants desseins bariolés (qui faisaient parfois de l’effet !). On ne jetait rien, les chaussettes en laine du pays étaient ravaudées, les pantalons rapiécés à plusieurs reprises, les sabots étaient bardés de solides clous pour qu’ils s’usent moins vite (les poubelles n’existaient pas). Les mamans qui défaisaient leur tricot, refaisaient des écheveaux autour des bras des enfants ou autour du dossier d’une chaise.

Les enfants jouaient aux jeux de société : jeux de l’oie, de dames, aux dominos, à mistigri, à la bataille.

Quand les hommes étaient autour de la table, le chef de famille sortait son paquet de « gris », tabac grossier, et son « cahier » de papier à cigarette, de marque Lacroix ou Job, qui faisait le tour de la table. Parfois, quelques anciens en profitaient pour prendre discrètement en plus, une « chique »2. Chacun allumait sa cigarette avec son briquet à essence qui faisait une grande flamme. Il y avait plusieurs positions : la tête penchée sur le côté, les lèvres en « cul de poule » pour ne pas se bruler les moustaches. Les tapis de cartes arrivaient avec les litres de rouge, les parties étaient acharnées.

papier-job-f

Le temps du casse-croûte était proche, la tablée s’agrandissait. Si la « tuaille » était récente, on sortait toute sorte de charcuterie : saucisses cuites, pâté, caillettes, fromage de tête ; ceux qui le pouvaient, la tourte de seigle faite maison ainsi que les litres qui ne cessaient de défiler. Venaient les fromages que l’on descendait de la « chasayre » (garde-manger), petit placard avec un fin grillage, et enfin les confitures. Le café et la tisane étaient bien appréciés pour accompagner les pâtisseries. Enfin, la « goutte », l’eau de vie pour les hommes et pour les femmes des liqueurs douces : verveine, gentiane, tilleul toujours faites maison.

Pendant ce temps, les conversations s’animaient sur la chasse, souvent sur les souvenirs de la guerre de 14 - 18, et même sur la politique (c’était parfois chaud !).

Minuit était passé, arrivait le temps des remerciements et surtout de la « revanche ».

Ces veillées n’étaient jamais très éloignées, pour autant, les jeunes faisaient des kilomètres de Pailhès à Féogoux, des Mouriers à la Moureyre, de Lachapelle au pont des Lièvres ou à Paiharès.

 

Et oui, toutes ces rencontres conviviales ont disparu un peu avec le travail à l’usine, mais surtout avec l’arrivée de la télévision et son individualisme.

 

PS : cependant, tout le monde n’a pas vécu ces moments-là de la même manière. Chaque famille ayant ses habitudes.

                                                                                                                                                        

H.F.

 

 

 

1 Le tabac à priser était de la poudre très fine de tabac que l’on achetait au bureau de tabac. Les amateurs prenaient de petites pincées de cette poudre et la mettaient dans les narines tout en respirant assez fort. Ceux qui n’avaient pas l’habitude, ne tardaient pas à éternuer bruyamment. Aussi, les « priseurs et priseuses » chevronnées avaient des narines maculées.

 

2 Et oui, certains messieurs avaient pris la mauvaise habitude de manger du tabac. Dans les tranchées de 14 – 18, la cigarette était formellement interdite car dans la nuit, le point rouge incandescent indiquait un adversaire.

Nous avons même connu des femmes qui « chiquaient » discrètement. Nous pensons que ces mauvaises habitudes leur étaient venues des maux de dents qu’elles rendaient supportables par ce tabac durant leur jeunesse. En effet, il permettait de calmer la douleur liée aux dents abimées. La dépendance au tabac s’était installée.

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